Je viens d'acquérir une série de photos stéréoscopiques1 du début du XXe s. montrant des sites égyptiens, et je m'empresse bien sûr de venir les partager avec vous.
La première montre le temple de Louqsor, vu à partir du pylône de Ramsès II en direction du sud-ouest. On reconnaît au premier plan la mosquée Abu l-Haggag2, avec ses deux minarets et la coupole qu'on aperçoit derrière le premier, et la grande cour de Ramsès II. Derrière le 2e minaret, la colonnade d'Amenhotep III3, puis au fond la cour d'Amenhotep III3. Et bien entendu, en toile de fond, le Nil. Vous remarquerez à gauche, sur le côté de la cour d'Amenhotep III, des habitations qui n'ont pas encore été abattues à l'époque où la photo a été prise.
La seconde nous montre le temple de Philae tel qu'il se présentait avant la construction du barrage4. On peine à reconnaître le site, qui a d'abord été en partie immergé avant d'être finalement déplacé sur une île voisine. Au centre, on aperçoit le temple d'Isis et son grand pylône, et sur la gauche les colonnes du kiosque de Trajan. Emouvant témoignage de ce qu'ont pu voir les voyageurs d'autrefois.
La dernière fait partie de ces " scènes ethniques " qui étaient tant appréciées au début du XXe s. , mises en scène par les photographes pour satisfaire le goût d'exotisme du public sans toujours refléter ou comprendre la réalité du pays5. La photo a ici pour sujet principal un certain Tigran Bey, présenté comme un aristocrate local de Saqqarah ; monté sur superbe cheval arabe et richement vêtu, il est suivi par un second personnage présenté comme son serviteur. La scène se déroule dans les champs, à l'orée d'une palmeraie. Mais si on regarde plus attentivement, on distingue au lointain un autre élément : la pyramide à degrés de Djoser, symbole majeur de la nécropole de Saqqarah.
Notes :
1- Une page est en préparation sur l'historique de la photographie stéréoscopique et son principe.
2- Nous reparlerons prochainement de cette mosquée.
3- Ou Amenophis III, selon l'appellation grecque ; je préfère celle d'Amenhotep, adoptée par les pays anglophones, car elle est plus proche du nom égyptien originel.
4- Construit de 1902 à 1908, puis réhaussé en 1912 et 1933.
5- Certaines de ces scènes mettent d'ailleurs aujourd'hui très mal à l'aise, car elles reflètent un état d'esprit qui ne fait pas honneur à la civilisation occidentale - c'est l'époque où on " reconstitue " aussi des " scènes ethniques " lors des expositions universelles ou coloniales, exhibant des êtres humains à la curiosité malsaine des badauds en mal d'exotisme... Même si certaines photos de ce type constituent de vrais documents sur la vie d'autrefois, beaucoup sont des mises en scène qui montrent le décalage entre le regard porté sur le pays et sa réalité : voilà qui nous incite aujourd'hui encore à réfléchir, non ?
(photos : collection de l'auteur)
PS : mon amie Michelle m'a indiqué en commentaire des photos de sa galerie qui permettent de faire le parallèle entre l'Egypte des photos anciennes et celle d'aujourd'hui, en particulier avec le précédent article sur les pyramides de Gizeh telles qu'on ne les voit plus. Vous trouverez ces photos ici et ici , et ne manquez pas de parcourir les galeries et le blog de Michelle, dont nous reparlerons bientôt.