Le costume porté par les danseuses égyptiennes a beaucoup évolué à partir de la seconde moitié du XIXe s. Et le costume traditionnel des Ghawazy a totalement disparu au profit des tenues mises au point pour les spectacles de cabaret destinés aux touristes dans les années 1950.
Eugène Giraud, Danseuse au Caire (1866, huile sur toile, musée de Toulon). Il s'agit d'une Ghazeyya, portant le costume des danseuses du début de la seconde moitié du XIXe s., lorsque les Ghawazy ont été autorisées à revenir au Caire.
Le costume ancien des Ghawazy apparaît dans de nombreuses toiles orientalistes, certaines avec réalisme, même si elles se teintent de cette charge de fantasme érotique que constitue pour les Occidentaux de l'époque la danseuse orientale. Il a été particulièrement bien décrit au XIXe s. par un orientaliste britannique, Edward W. Lane1. On peut tout à fait comparer les informations de Lane à l'aquarelle de David Roberts intitulée Ghawazee du Caire :
Sur la qamis, chemisier en étoffe fine descendant jusqu'à mi-cuisse, à manches amples et pendantes, ou plus rarement étroites, les danseuses portent soit l'anteree, une veste courte s'arrêtant sous la poitrine ou à la taille, soit le yelek, un long gilet descendant jusqu'aux chevilles, à manches ouvertes et pendantes à partir du coude. Au lieu des jupes devenues de rigueur à partir de la fin du XIXe s. , les Ghawazy d'autrefois sont invariablement vêtues du shintiyan, un pantalon bouffant. Comme aujourd'hui encore, un foulard était noué autour de leurs hanches pour souligner les mouvements de la danse. Les noms des éléments du costume montre le mélange d'éléments turcs et arabes : le " yelek " et le " shintiyan ", par exemple, sont d'origine turco-persane.
Dans cette gravure, on voit deux Ghawazy avec des vêtements aux étoffes très colorées. Celle qui est à l'avant porte un shintiyan aux motifs floraux d'inspiration turque.
Les couleurs de ces vêtements varient, ne serait-ce que selon la richesse des étoffes que la Ghazeyya pouvait porter. La qamis était le plus souvent blanche, quelquefois noire. Très souvent, anteree et yelek, parfois même le shintiyan, étaient à rayures, ou encore de couleur unie. Certaines représentations nous montrent des étoffes de couleurs vives, ou rehaussées de motifs floraux d'inspiration turque ou persane.
Détail de l'aquarelle de Roberts montrant la coiffure typique de fines tresses ornées de piécettes.
Leur coiffure également était caractéristique. Leurs cheveux étaient le plus souvent tressés en de nombreuses petites nattes dans lesquelles se mêlaient des fils de soie et auxquelles étaient accrochées des piécettes produisant des sons lors de leurs mouvements. Elles portaient un petit tarbush rouge rehaussé d'un turban de couleur variable, mais le plus souvent blanc ; sur le front était fixé un disque d'or filigrané, appelé kurs, et des piécettes étaient souvent également cousues au turban.
Une gravure représentant des Ghawazy dans l'ouvrage d'Edward W. Lane, très proche de l'aquarelle de Roberts.
Selon une tradition orientale qu'on retrouve également dans l'Inde musulmane, le bout des doigts, la paume des mains, les orteils et la plante des pieds étaient teints au henné.
La Ghazeyya que Gérome présente comme une "Almée" dansant pour des soldats donne sans doute une idée de ces danseuses en tenue légère évoquées par Lane, même si le ventre dénudé est sans doute à mettre sur le compte de la part de fantasme du peintre occidental.
Lane mentionne enfin que certaines Ghawazy, quand elles se produisaient en privé pour un public masculin, ne portaient qu'une tob, sorte de robe en étoffe très légère largement ouverte sur le devant, et le shintiyan.
Gravure montrant le Britannique Edward W. Lane en costume oriental.
Notes :
1- Edward William Lane (1801-1876), orientaliste britannique qui séjourna en Egypte à plusieurs reprises et dont nous reparlerons ; ayant appris l'arabe au Caire, il a laissé une oeuvre importante, dont une Description de l'Egypte, une traduction des Mille et une Nuits, un Dictionnaire Arabe-Anglais ou encore des Morceaux choisis du Coran. C'est dans Manners and Customs of the modern Egyptians (1833-1835), un best-seller à l'époque, qu'il évoque les Ghawazy.
commenter cet article …