Abu Simbel est une petite localité en plein désert, quelques maisons de style nubien, d'autres sans style. Pas le temps d'ailleurs de la visiter, déjà il faut rejoindre les bus qui doivent former le convoi en direction d'Aswan. Car en Egypte, beaucoup de déplacements pour les étrangers se font en convois accompagnés par la police et les militaires ; ça impressionne un peu au début, mais on s'y fait. L'attente est assez longue ; il faut attendre que les autres groupes de touristes aient fini leur visite, mais aussi le bon vouloir de l'escorte...
Enfin le convoi se met en marche, une route unique qui court à travers le désert nubien, avec un poste militaire de temps à autre. Il faut compter un peu plus de trois heures pour rejoindre Aswan. La plupart de mes compagnons de voyage s'endorment. Mais moi, je ne peux pas fermer les yeux quand un tel spectacle s'offre à moi : le désert, que je vois pour la première fois, ce désert qui m'a toujours fasciné et que je voulais voir un jour ; encore un rêve qui se réalise, mais hélas derrière les vitres d'un bus... Comme j'aimerais me promener dans ces étendues de sable et de pierre qui provoquent un mélange indéfinissable de crainte et d'attirance. Le désert est loin d'être monotone, il est changeant ; parfois des dunes, du sable à perte de vue, parfois de petits monticules de roche aux couleurs incroyables qui résistent à l'érosion. Des collines, isolées ou groupées, beaucoup de forme pyramidale : l'origine de cette forme architecturale ? Les couleurs sont somptueuses, elles déclinent tous les tons de sable, les ocres, les rouges, les bruns, avec ce ciel d'un bleu profond et cette lumière qui sature le tout. Parfois un mirage, une étendue d'eau fictive qui danse au milieu de nulle part... Je suis sous le charme, la rencontre est intense. On comprend que les premiers moines soient apparus ici, dans les déserts d'Egypte ; ces lieux sont comme habités d'une force surnaturelle, une atmosphère qui pousse à l'exaltation des beautés de ce monde dans un milieu pourtant hostile à la vie... C'est aussi un aspect essentiel de la civilisation égyptienne qui apparaît au fil des réflexions silencieuses - car à contempler un tel spectacle, on descend en soi en quelque sorte.
Un incident vient nous distraire. Le bus fait parfois des bruits étranges. La climatisation a des ratés, la chaleur à l'intérieur est par moment suffocante. Comme nous sommes avec les gens les plus sympathiques et les moins conventionnels du groupe - on se demande pourquoi nous avons laissé les autres se précipiter dans les premiers véhicules... - , les plaisanteries fusent et c'est une hilarité générale. Nous nous imaginons déjà en panne au milieu de ce désert ; une amie et moi trouvons cette perspective exaltante, au moins nous pourrions descendre... Mais le véhicule poursuit sa route, le chauffeur est confiant. Mafeesh moshkela ! Pas de problème !
Le lac Nasser, avec au loin les montagnes désertiques...
Je passerai sous silence la visite du barrage d'Aswan, qui m'a peu intéressé, je dois l'avouer, et dont je n'ai rien retenu de particulier. Le lac Nasser est d'une grande beauté, mais on ne peux m'empêcher de penser au sacrifice que la construction du barrage a représenté pour les Nubiens. Au passage, nous avons aperçu le termple de Kalabsha, que je devrai pour cette fois me contenter de voir de loin...
Au loin, le temple de Kalabsha, précédé de son kiosque...
Et puis bientôt l'arrivée sur Aswan, et le second coup de foudre du voyage...