Il existe de multiples façons de transcrire les sons de la langue arabe et de ses dialectes ; en général, on utilise des signes
phonétiques conventionnels qu'il serait difficile et sans doute fastidieux d'utiliser ici. Aussi opterons-nous pour une transcription simplifiée, qui est souvent celle
adoptée pour transcrire les dialectes en caractères latins.
Une différence sera à noter entre l'arabe littéral (al-fusHa) et l'arabe dialectal
égyptien (masri ou sa'idi) ou libanais (lebnani), les deux principaux dialectes que nous
rencontrerons, en particulier dans les chansons. Cela tient au fait qu'il existe des variantes entre l'arabe littéral, qui est la langue écrite et soutenue, et les différents dialectes. Les
consonnes tendent à être moins complexes en dialectal - ce qui est pratique pour nous non arabophones -, mais ce sont surtout les voyelles,
en particulier les voyelles brèves, qui diffèrent ; une raison simple à cela : en arabe, comme dans la plupart des langues sémitiques, on n'écrit que les consonnes et les
voyelles longues, qui sont en fait des semi-consonnes.
Un tableau récapitulatif très simple permet de s'y retrouver, d'adopter un mode de transcritpion des sons sans entrer dans toutes les subtilités de la langue.
Pas d'inquiétude : un locuteur égyptien, par exemple, sera très heureux que vous fassiez l'effort de parler quelques mots de son dialecte et fera l'effort de vous comprendre, même si votre
prononciation n'est pas excellente au début.
Graphie arabe |
Transcription sur le blog |
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en arabe littéral (fusHa) |
en dialectal égyptien (masri) ou libanais |
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ا |
â |
â / aa |
ب |
b |
b |
ت |
t |
t |
ث |
t |
t |
ج |
j |
g |
ح |
H |
H |
خ |
kh |
kh |
د |
d |
d |
ذ |
d |
d |
ر |
r |
r |
ز |
z |
z |
س |
|
|
ش |
sh |
sh |
ص |
|
|
ض |
D |
D |
ط |
T |
T |
ظ |
Z |
Z |
ع |
3 |
3 |
غ |
gh |
gh |
ف |
f |
f |
ق |
q |
q / ' |
ك |
k |
k |
ل |
l |
l |
م |
m |
m |
ن |
n |
n |
ه |
h |
h |
و |
w / û |
w / oo |
ي |
y / î |
y / ee / ê |
Quelques remarques et explications :
b , t , j , d , z , f , k , l , m , n se prononcent exactement comme en français , c'est déjà ça !
Il y a trois voyelles longues, qui sont des semi-consonnes selon leur position :
- 'alif se prononce -â , c'est-à-dire -a long , qui a d'ailleurs tendance à s'allonger vers un -o à certaines positions dans le mot ou dans les dialectes.
- wâw se prononce -w, comme dans l'anglais "well" , quand il est consonne, et -û c'est-à-dire -ou long quand il est voyelle ; le -u français n'existe pas en arabe, ni en littéral, ni en dialectal. En dialectal, cette voyelle longue est en général transcrite "oo", forme que nous adopterons ici ; mais vous trouverez aussi très souvent "ou " dans les transcriptions françaises et même parfois égyptiennes.
- yâ' se prononce - y, comme dans "joyeux", quand il est consonne, et -î c'est-à-dire -i long quand il est voyelle.
Une différence apparaît ici en dialectal égyptien : yâ' en tant que voyelle, transcrit en dialectal -ee, -y ou -ê ; au niveau de la prononciation, nous adopterons comme convention : -ee et -y , se prononçant - i long, et -ê correspondant au son- ê long comme dans " tête " ; à l'écrit en caractères arabes, on ne voit bien entendu pas la différence.
Et les voyelles brèves, me direz-vous ? Elles ne sont pas des lettres en arabe, mais des signes qu'on place au-dessus ou en-dessous de la consonne vocalisée, et qui ne sont pas obligatoires - les 3/4 du temps, les textes arabes ne mentionnent pas les voyelles brèves. Elles sont également au nombre de 3 :
- a bref, qui se prononce entre un " a " et un " è ". En dialectal, il peut être souvent noté " e ".
- i bref, qui se prononce entre un " i " et un " é ", un peu comme le -i bref anglais ; en dialectal, il est d'ailleurs souvent noté " e ".
- u bref, qui se prononce entre " ou " et " o ". Il est noté en dialectal " o ".
Maintenant, des sons un peu plus inhabituels pour
des locuteurs français, et, il faut bien l'avouer, certains même difficiles à prononcer. Commençons par ceux qui nous seront les plus familiers.
- j se prononce comme en français en littéral, mais devient -g dur (comme dans " gare " ) en masri et libanais, mais
-dj en sa'idi (dialecte de Haute-Egypte) et dans les dialectes maghrébins.
- H est un - h très aspiré qui vient du fond de la gorge.
- r est toujours roulé.
- s est toujours dur, c'est-à-dire qu'il se prononce toujours -s même entre deux voyelles.
- q est un des sons les plus difficiles : c'est une sorte de -k venant du fond de la gorge prononcé en bloquant l'air. Par chance, il disparaît en
égyptien et est remplacé par une interruption du son. Par exemple qalbî (mon coeur) en littéral devient 'alby en masri ; très pratique
pour éviter ce son ! Car la nuance peut avoir de l'importance : si qalbî signifie " mon coeur ", kalbî signifie " mon chien "... je vous laisse
imaginer les quiproquo qui peuvent en découler ! Cependant, dans certains cas et afin de permettre de faire le parallèle entre fusHa et dialectal, ou de reconnaître un mot à l'écrit, nous
noterons le -qâf non prononcé en égyptien par q .
exemple : qawi se prononce 'awi en égyptien, mais correspond à l'écrit à قوي et est donc noté qawi.
-h est légèrement aspiré.
La
majuscule n'existant pas en arabe, nous utiliserons les majuscules pour marquer ce qu'on appelle les consonnes emphatiques ; ces consonnes
sont très marquées en littéral, mais quasiment absentes ou très légères en dialectal :
- S est un - s prononcé comme si on avait la bouche pleine, la langue passant entre les dents tandis que l'air est expulsé.
- D est assez subtil, correspondant à un - th doux anglais mais emphatique.
- T est lui-même assez subtil, un - t emphatique avec la langue contre les dents supérieures et l'air fortement expulsé. En Egypte, il est simplement
prononcé -t en général.
- Z , de même, est un - z emphatique, avec la langue bloquée contre les dents inférieures et l'air fortement expulsé. En Egypte, il se prononce comme un
simple - z.
Certaines lettres soulignées indiquent des sons qui forment des variantes de sons que nous connaissons :
- t correspond à peu près au - th dur anglais de "thing" (la langue vient se
bloquer contre les dents du haut) ; il s'entend surtout en arabe littéral, parfois en masri mais très léger, et souvent prononcé comme -s au Moyen-Orient.
- d correspond à peu près au - th doux anglais de " the ". Il est soit
très estompé, soit absent en masri, ou encore se prononce -z.
Les sons transcrits par deux lettres sont soulignés pour ne pas introduire de confusion avec deux consonnes arabes qui se prononceraient séparément :
- kh est un son guttural équivalent à la jota espagnole ou au - ch dur
allemand de "Nacht".
- sh correspond à notre son français - ch de " chat " ; attention, un -h peut
suivre un s sans pour autant former le son -ch : on prononce alors les deux consonnes ; c'est pourquoi il est important de noter la différence par écrit.
- gh n'a pas d'équivalent en français ; c'est un -r prononcé du fond de la gorge, un peu plus prononcé
que le -r français (si, si, faites l'expérience, le -r français, si difficile à prononcer pour de nombreux étrangers, vient de la gorge).
Enfin,
sans doute l'un des sons les plus difficiles à maîtriser de la langue arabe quand on débute : le 3ayn, transcrit par le signe -3, qui est un son qui vient du plus profond de la gorge en bloquant l'air dans
celle-ci et en articulant sur la base d'un -a. En dialectal, il est très atténué et se prononce pratiquement comme un -a mais en marquant une séparation entre les
syllabes.
Concernant la pratique orale, deux conventions que nous adopterons pour la prononciation dialectale :
- les voyelles qui sont notées entre parenthèses signifient que la voyelle existe en principe dans le mot, mais
que dans la prononciation elle est supprimée par contraction. Tout comme lorsque nous parlons français dans la vie courante, les Egyptiens ont tendance à contracter les mots et à
faire disparaître les voyelles brèves des syllabes non accentuées.
exemple : etnên ( " deux " ) se prononce dans la langue parlée " tnên " et sera donc noté (e)tnên, le premier -e disparaissant dans la prononciation.
- les voyelles qui sont notées en exposant sont ce qu'on appelle des voyelles de disjonction : pour faire
simple, en arabe dialectal, trois consonnes ne peuvent se suivre sans voyelle ; lorsque c'est le cas, quand on ajoute un préfixe ou suffixe ou que deux mot se suivent et amènent
3 consonnes ou plus à se rencontrer, on intercale une voyelle brève, la voyelle de disjonction.
exemple : ba3d + bokra = ba3de bokra ( le 3ayn est une consonne, donc
-3d + b- = 3 consonnes à la suite --> -3d + voyelle de disjonction + b- )
Tout cela peut sembler un peu difficile, mais avec un peu d'entraînement on y parvient très bien. Servez-vous des chansons pour vous familiariser avec les sons, en particulier celles avec
lesquelles je vous donne les paroles ; peu à peu, shwayya shwayya, vous
parviendrez à vous familiariser avec les sons. Si vous pouvez avoir des enregistrements d'émissions égyptiennes ou arabes, par satellite par exemple, c'est très bien aussi. Les langues, c'est
aussi une question d'oreille et de mémoire auditive. Et dès que vous en avez l'occasion, parlez arabe avec des arabophones ; c'est le meilleur moyen de progresser, n'ayez pas peur de vous
tromper.