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17 janvier 2008 4 17 /01 /janvier /2008 16:05

Voici la suite des conseils de voyage donnés par Henry Cammas et André Lefèvre dans leur ouvrage sur leur visite en Egypte sous Napoléon III, que nous avions déjà rencontrés dans un premier article.


Le contrat de barque était passé entre le voyageur et le propriétaire de la barque. Il détaillait non seulement les caractéristiques du bateau, le trajet et le prix de la location, mais aussi tous les détails pratiques, y compris la composition de l'équipage, les moments de navigation, etc. En général, une partie de la location était payée d'avance au moment d'embarquer et le solde payé au retour. Ce document devait être rédigé en français (dans le cas de voyageurs français, bien entendu) et en arabe, visé par le consulat de la nation du voyageur et garanti par les autorités égyptiennes.


Ensuite, les voyageurs doivent recruter un cuisinier. Cammas précise qu'on trouve des cuisiniers italiens, plus chers et qui sont payés au forfait journalier, ou des cuisiniers arabes, qui sont payés au mois et que l'auteur juge préférables. 


Mais le plus intéressant pour nous, voyageurs d'aujourd'hui, est sans doute la liste que dresse Cammas des diverses provisions à faire avant le départ. Elle donne une bonne idée de l'expédition que représente encore à cette époque le voyage vers la Haute-Egypte. Il conseille de s'approvisionner au maximum à Alexandrie, où " tout est moins cher et plus abondant ".


Pour les provisions de bouche, du lait et du beurre ( " souvent mauvais " , précise-t-il, car il s'agit de semna, beurre clarifié qui surprend aujourd'hui encore les Européens), des oeufs et volailles telles que poules et pigeons (le pigeon est aujourd'hui encore un mets très apprécié des Egyptiens ; il ajoute qu'on peut acheter des dindes à Louqsor ! ). Quelques légumes, avec, outre les conserves (eh oui, déjà ! ) : oignons, concombres, lentilles jaunes ( " très-bonnes " dit-il cette fois ! ), épinards (sans doute l' " épinard égyptien ", ou corete, qu'on utilise en particulier pour la confection de la molokheyya), pommes de terre ; quelques fruits aussi : melons et pastèques. Pour la viande, on se fournit en cours de route en faisant abattre un boeuf ou un mouton, ou en se fournissant chez un boucher dans les villes ; Cammas précise que la viande est bon marché, et qu'elle " se conserve quatre jours" ; sinon, on consomme aussi de la viande en boîtes de conserve. De la farine en tonneau (il conseille celle venant de Trieste) et des grains, des jambons anglais ( "les meilleurs en Egypte"... ), des fromages de Chester et de Hollande ( "les seuls qu'on puisse conserver dans une boîte, sous un linge légèrement humide")... etc.

Il précise qu'on trouve à Qenah du café directement venu d'Arabie par les caravanes de la mer Rouge ; c'est en réalité du café du Yémen, longtemps considéré comme le meilleur au monde.

Parmi les autres provisions, on note de la poudre et des plombs, ainsi que "un grand nombre de cigares communs", qui servent à offrir durant le voyage ; il y a peu de temps encore, les touristes distribuaient des stylos... Outre les tentes pour les bivouacs, il conseille d'emporter quelques fusils et pistolets, ainsi que des "kourbachs" dont il explique que ce sont des nerfs d'hippopotame (eh oui, il y avait encore à cette époque des hippopotames dans le Nil...). Egalement un pavillon aux couleurs de la nation des voyageurs, qu'on hissait chaque matin ou en croisant un autre navire.

Pour terminer, Cammas nous donne les étapes du voyage-type de cette époque, ce qui est très intéressant. Pour le voyageur qui prend une barque à Alexandrie, il remonte par le canal de Mahmoudieh pour rejoindre le Nil aux écluses d'Atfé 1. Il propose une excursion jusqu'à Rosette, qui nécessite deux jours de voyage, et un arrêt à Abou Mandour 2, lieu de pélerinage. D'Alexandrie au Caire par bateau, il faut compter 7 à 8 jours. Il explique qu'on peut aussi, pour gagner du temps, prendre le train Alexandrie-Suez et arriver en 8 heures au Caire, d'où on peut alors embarquer pour la Haute-Egypte. Du Caire à la 2e cataracte, le voyage dure 40 jours, 46 si les vents sont contraires. "Les étapes sont Massara-Adim 3, Cafersnaia 4, Béni-Souef  5, Mahaga 6, Colosaneb 7, Samalud 8, Minieh 9, Rauda 10, Melawi 11, Lamarn 12, Djébel-bou-Affodah 13, Manfalout 14, Syout 15, Aboutig 16, Souaghi 17, Girgeh 18, Farchout 19, Kéneh 20, Négadeh 21, Louqsor, Hermant 22, Esneh, Debbone 23, Gannech 24, Assouan, Philae, Déboud 25, Abou-Hor 26, Costab 27, Thialle 28, Médik 29, Séboua 30, Longa 31, Korosko 32, Kette 33, Toské 34, Formondi 35, Ibsamboul 36, Kosko 37, Ouadi-Alfa 38." Un long périple, qui menait donc les voyageurs aux confins du Soudan.




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Notes
:

1 - Ces écluses, dont parlent souvent les voyageurs, étaient l'une des premières occasions de payer les taxes de circulation sur le Nil.

2 - Abou Mandour : site proche de Rosette où se trouve une mosquée que l'on allait fréquemment visiter.

3 - Maasara, entre Le Caire et Saqqarah.

4 - Peut-être Kafr Halâwa, près de Meidoum ?

5 - En arabe Bani Suwayf, en Moyenne-Egypte.

6 - Maghâghah.

7 - Kolosna, en arabe Qulûsana.

8 - Samâlût.

9 - el-Minyeh.

10 - er-Rawdah.

11 - Mallawy.

12 - Peut-être Tell el-Amarna ?

13 - Non localisé.

14 - Manfalût.

15 - Assiout, en arabe Asyût.

16 - Abu Tig, à peu de distance d'Assiout.

17 - Sohag.

18 - Girga.

19 - Farshut.

20 - Qenah, en arabe Qinâ, ville située face au site de Denderah.

21 - Naqada.

22 - Armant.

23 - Peut-être Edfou ?

24 - Peut-être Nag el-Hawsh ?

25 - Dâbûd, entre Assouan et kalabsha, sur les rives du lac Nasser.

26 - Aujourd'hui noyé sous le lac Nasser.

27 - Peut-être Kalabsha ?

28 - Sayyâlah, sur le lac Nasser.

29 - el-Madîq, sur le lac Nasser.

30 - Wadi es-Seboua.

31 - Non localisé.

32 - Kuruskû, sur le lac Nasser.

33 - Qattah, sur le lac Nasser.

34 - Tôshka, pratiquement en face d'Abu Simbel.

35 - Non localisé.

36 - Nom autrefois donné par les Européens à Abu Simbel. En arabe Abu Sunbul.

37 - Ancien chef-lieu de district de Nubie.

38 - Wadi Halfa, à la frontière soudanaise.

Pour les références de l'ouvrage, se reporter au précédent article.

Les illustrations sont en cours de copie par scanner à partir de cartes postales anciennes de ma collection.

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commentaires

:
Me revoilou ! ! Journée de rêve à El Gouna: j'en ai profité pour prendre beaucoup de photos ! ! <br /> Bisous gelés de la mer rouge ! @nne marie
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K
Ca fait plaisir de te savoir contente, ya ukhti ! Je vais aller voir tout ça de ce pas. Même gelés, j'aime toujours autant les bisous de la mer Rouge, lol ! Gros bisous de Provence où il gèle aussi.

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  • : Horizons d'Aton - Beyt Kaaper
  • : Une demeure perdue quelque part entre rêve et réalité, dans les sables du désert égyptien ou sur les flots de la Méditerranée. Tournée vers l'horizon, les horizons divers... Les horizons de l'Est et de l'Ouest, comme disaient les anciens Egyptiens... Une demeure un peu folle, pour abriter des rêves un peu fous, des passions, des émotions, des coups de coeur...
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